• Les déshérités ou L'urgence de transmettre de François-Xavier Bellamy

    Une analyse de Nicodème sur le livre Les déshérités ou L'urgence de transmettre de François-Xavier Bellamy

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    A quoi peut servir la philosophie ? A comprendre le monde dans lequel on vit ; à comprendre pourquoi on en est là où on en est aujourd’hui. De ce point de vue, la philosophie n’est pas seulement hautement utile ; elle devient carrément nécessaire !

    Si l’on voulait un tant soit peu s’en convaincre, on pourrait lire le livre (récemment publié aux éditions Plon) de ce jeune professeur de philosophie, François-Xavier Bellamy, dont le titre Les Déshérités, sonne comme une réponse à l’œuvre du sociologue Bourdieu publiée il y a 50 ans (Les Héritiers).

    C’est entre autre de cet auteur (Bourdieu) dont il est question dans l’ouvrage de François-Xavier Bellamy qui, en réfléchissant sur  le problème, voire la crise de l’éducation et de la transmission que nous traversons depuis plusieurs décennies, (le sous-titre de son œuvre est : « l’urgence de transmettre »), interroge la finalité de ce qu’éduquer veut dire. Pour ce faire, l’auteur  choisit de faire la généalogie de notre conception de l’enseignement, en relisant – et en reliant – trois auteurs qui ont profondément influencé la pédagogie moderne et contemporaine.

    Il s’agit d’abord de Descartes (XVII° siècle), père du rationalisme moderne et du savoir auto-suffisant ;

    il s’agit ensuite de Rousseau (XVIII° siècle), auteur d’un traité (L’Emile) qui a fait et continue de faire référence en matière de sciences de l’éducation et  qui a jeté sur les éducateurs une profonde suspicion, l’influence sur l’enfant étant considérée comme intrusive et aliénante.

    Il s’agit enfin du sociologue contemporain Bourdieu pour lequel l’éducation et l’école ne font que transmettre des inégalités culturelles et maintenir les classes sociales défavorisées dans une situation de dépendance injuste.

    Le mot d’ordre de la pédagogie depuis 30 ans, qui part d’un « bon sentiment »,  est donc paradoxalement le suivant : « éduquons surtout sans rien transmettre » pour ne pas corrompre ni compromettre la pureté de la jeunesse avec quelque vilaine tradition que ce soit (étymologiquement tradere, à l’origine du mot « tradition », signifie « transmettre » en latin).

    Sans hargne aucune et de façon tout à fait raisonnée, l’auteur établit un constat (et en explique les raisons) : celui de l’échec de nos perspectives éducatives étatiques actuelles.  Les chiffres de différents rapports PISA – que l’auteur cite – parlent d’eux-mêmes. Un rapport de l’Education nationales de 2008 révèle, par exemple que, dans l’intervalle de 1987 à 2007, les performances des élèves de CM2 sont passées de 26 à 46% des élèves en grande difficulté orthographique…

    Comment sortir de l’ornière ? Le livre de François-Xavier Bellamy ne s’arrête pas à un  constat désespéré et à son analyse. Des pistes pour une « conversion » du système éducatif sont envisagées, au moins dans ses principes. La crise n’est pas issue d’un problème de « moyens » mais d’un défaut de finalités. Pour retrouver le sens de l’acte d’enseigner, il faut rompre avec le mythe de l’élève qui pourrait « se faire seul » en renonçant ou en reniant tout héritage, toute transmission. L’humanité ne se fait pas sans «  médiation » : sans « maître »  (et d’abord sans parents), l’homme ne peut s’enraciner, se construire. Reconnaître notre dépendance fondamentale vis-à-vis de ceux qui nous ont précédés est une urgence. Ne pas réagir en ce sens, ce serait aller vers une «  monde d’inculture et d’indifférence, promesse d’accomplissement d’une liberté absolue, [qui] pourrait bien être celui d’une sauvagerie encore inédite –et d’autant plus menaçante que, par cette inculture même, elle nous rendra incapables de la percevoir à mesure qu’elle nous saisira » (Les Déshérités, p.173).

    S’armer d’intelligence pour comprendre notre monde et continuer d’ouvrir un avenir chargé de sens, en vue du relèvement et de la transmissionde la culture, voilà l’urgence ! Ce livre est donc à conseiller à tous les parents, grands-parents, enseignants ou à tous ceux qui ont le désir, la vocation ou simplement la tâche  d’être éducateur.

    Nicodème

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